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Conversion de Charles Péguy au christianisme

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Env. 1906

"Je ne t'ai pas tout dit… J'ai retrouvé ma foi… Je suis catholique." Cette confidence de Péguy à son ami Joseph Lotte date de septembre 1908. Elle est le seul repère temporel que nous ayons de l'évolution spirituelle de l'auteur. Chez lui, pas de conversion subite comme chez Claudel, pas d'événement surnaturel, pas de rupture. Il ne rebrousse pas chemin, mais trouve enfin ce qui fonde et oriente ses engagements.

"C'est pour cela, écrit-il dans Notre jeunesse, que notre socialisme n'était pas si bête, et qu'il était profondément chrétien." En gestation dans ses méditations sur la métaphysique du monde moderne, la foi de Péguy devient explicite à partir de 1910, constituant désormais l'axe principal de sa pensée et de la recherche formelle qu'il entame en se lançant dans la poésie. Péguy n'est pas un converti : ce terme implique un revirement et une rupture qu'il récuse absolument. Il est un penseur, un chercheur, qui, à un moment donné de sa quête, rencontre le christianisme non comme un aboutissement, mais comme une borne sur le chemin qu'il suit depuis toujours. C'est cela qui fait l'originalité et la portée de ses œuvres dites chrétiennes : elles ne signent pas une appartenance, elles ne célèbrent pas une vérité reçue une fois pour toutes. Péguy n'a jamais été aussi sévère envers l'Eglise qu'après son adhésion au Christ ; marié non religieusement, il ne communie pas. Parmi les catholiques de son temps, il est totalement marginal. En revanche, l'incessant travail de sa foi par son intelligence et son art donne aux œuvres écrites entre 1909 et 1914 la dimension théologique et prophétique qui en fera des ferments pour le christianisme à venir.

Dans un premier temps, Péguy se retrouve durement isolé. Ses abonnés, dreyfusards de la première heure, ne comprennent pas forcément sa trajectoire intérieure. Il traverse une crise profonde, qui se traduit par la tentation du désengagement. Un cahier aux accents pathétiques, A nos amis, à nos abonnés, paraît en juin 1909. Péguy y laisse libre cours à sa lassitude et à son découragement. "Nous sommes des vaincus" est le leitmotiv qui scande ces pages, où l'écrivain déplore le délitement du dreyfusisme et l'échec de sa revue. Moins son échec commercial que celui de l'ambition qu'elle s'était donnée de "refaire un public en ce pays", par la pratique du débat, la diffusion de la culture, la dénonciation de l'injustice. Péguy se dit prêt à lâcher la barre, pour se consacrer à une œuvre personnelle. En fait, c'est bien dans le cadre des Cahiers de la quinzaine qu'il va produire, avec une extraordinaire fécondité, les grandes œuvres des dernières années de sa vie.

Source : http://charlespeguy.fr/La-dent-du-dieu-qui-mord